vendredi, octobre 07, 2005

4 - Simon

Lire le préambule - 1 - 2 - 3

Au cours du mois d’octobre suivant, alors que Rennes était sous la pluie une nouvelle fois, Paul m’annonça leur divorce.
Je m’interrogeais sans trop d’illusion sur la raison de ce brutal revirement de leur passion, lorsqu’un courrier de Séverine m’apprit sobrement que Paul menait en fait une double vie, lié qu’il était à une femme mariée avant même leur rencontre.
Affligée pour ma cousine, je l’accueillis quelque temps à l’appartement.
Elle avait la chance de travailler en saison touristique dans des palaces comme hôtesse d’accueil, ce qui était assez rémunérateur pour lui assurer six mois de vacances sur douze.

Mon activité libérale de joaillière ne me laissait que deux ou trois semaines de vacances arrachées à la force de l’adversité économique : je concevais donc un certain dépit que la réunion joyeuse de nos deux célibats ne parvenait pas à effacer. D’autant moins que, pour couronner le tout, Séverine, pourtant jadis femme d’intérieur si soignée, s’ingéniait à mettre sens dessus dessous l’espace étriqué de mon domaine, ayant décrété qu’en tant que femme libre (et dûment désespérée par son chagrin d’amour), son droit le plus strict était le vautrage devant la télé, et le sabotage systématique de toutes mes tentatives de rangement minimal.
Nous manquâmes de nous brouiller sérieusement, lorsqu’au détour d’une de ses moultes expériences de la vie sexuelle débridée de célibataire bien faite, destinées entre autres à faire valoir la suprématie féminine sur le genre faible, ma colocataire, animée d’une fougue peu commune, en était arrivée à faire trembler le plafond de mon atelier à la faveur d’une de ses mémorables siestes crapuleuses qu’elle avait l’audace – de surcroît – de me raconter par le menu, s’assurant que j’étais suffisamment édifiée pour applaudir à ses exploits acrobatiques avec des amants aussi stupides que séduisants.
J’en fus réellement sidérée, elle qui quelques mois auparavant prônait le mariage de son ton le plus dogmatique, quitte à me proposer de sortir avec l’un de ses ex.
L’occasion de cet ultime épisode fracassant avait fait fuir de mon magasin mon ami Simon, le meilleur des orfèvres avec lesquels j’avais l’heur de travailler. Il m’avait plainte abondamment, plein de commisération pour les conditions douteuses dans lesquelles j’étais obligée de professer.
Sa pitié me fit prendre conscience des limites de ma tolérance, et je mis en demeure ma cousine de se trouver un autre baisodrome sur le champ (pas le Champ de Mars, comme elle put le prétendre, je ne lui en voulais pas à ce point là).
Elle partit le lendemain. Avec celui-là même qui m’avait extraite de ses griffes.

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1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

« Avec celui-là même qui m’avait extraite de ses griffes » : là je ne vois pas trop. Un prénom serait le bienvenu.

mardi, décembre 04, 2007 7:55:00 PM  

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